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— N’avais-je pas raison ? dit Ferdinand en lui donnant la main pour rentrer dans le salon ; le voilà maintenant amoureux de sa femme. N’allez pas vous laisser attendrir ; traitez-le indignement, renvoyez-le à sa duchesse ; qu’il reparte désespéré… Mais vous n’aurez jamais ce courage. J’ai envie de me charger de le tourmenter pour vous. Si je lui parlais de l’amour d’Adrien ?…

— Ah ! mon Dieu ! s’écria Ermance d’un air terrifié.

— Cela ne ferait pas mal, je vous assure ; un peu de jalousie achèverait de bouleverser sa tête, et vous auriez le plaisir de le voir complètement fou : cela amuse tant les femmes.

— Par grâce, ne lui parlez point de moi, dit Ermance d’un ton suppliant.

— Cela dépendra de sa conduite, reprit M. de Maizières ; nous sommes une société d’envieux qui ne demandons qu’à tourmenter son bonheur. À votre premier signe de mécontentement, nous déploierons tous nos moyens, et nous vous vengerons d’une manière éclatante.

— Si vous en étiez capable, je me brouillerais avec vous.

— Eh bien, prouvez-nous qu’il vous rend heureuse, sinon votre tristesse lui coûtera cher.

— Comment ne serait-on pas heureuse de l’aimer ? dit Ermance en s’efforçant de sourire.

Adhémar s’approchait d’eux comme elle finissait ces mots ; il espérait pouvoir dire à Ermance quelque chose qui détruisît l’impression produite par le billet de madame d’Alvano. On ne lui en laissa pas la possibilité ; le reste de la soirée ne lui promettait pas plus de loisir. La pluie tombait par torrents. M. Brenneval exigea de madame de Cernan de ne pas se mettre en route par un si mauvais temps. Il fut convenu que tous passeraient la nuit au château, et que, pour remplacer les plaisirs de la promenade, on jouerait au wisth en écoutant les chansons de M. Fonteny. Ainsi les petits intérêts du monde sont toujours ennemis des intérêts de cœur.