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— C’est ce qu’elle avait de mieux à répondre, dit madame deCernan.

— Sans doute, reprit Auguste, mais on la croit dans ceci plus discrète que sincère ; il en résulte un intérêt de curiosité qui attire une foule de soupirants, et je prévois qu’elle va faire de grands ravages parmi nos agréables, car elle a bien la langueur la plus coquette !…

— Le comte Albert de Sh… n’en a-t-il pas été fort épris pendant son séjour à Vienne, demanda M. de Maizières ?

— On le dit, mais je n’en sais rien, répondit Auguste.

— Et moi, je présume, dit Adhémar, à la manière dont il sacrifiait ce matin sa beauté à celle d’une autre femme ; on n’est jamais si généreux que de son bien.

— C’est plutôt de la vengeance, reprit M. de Castelmont ; car il passe dans le monde pour avoir été, comme tous les adorateurs de la princesse Ranieska, attiré par ses charmes, encouragé par ses dolentes agaceries, puis rebuté par ses rigueurs.

— Sorte de manége dont nous devrions tous faire justice, dit M. de Maizières ; ces femmes-là se croient les plus honnêtes du monde, parce qu’elles n’ont pas assez de cœur pour aimer, et qu’après avoir passé par tous les degrés de la séduction, elles s’arrêtent juste au moment de prouver qu’elles étaient de bonne foi. J’ai cent fois plus d’estime pour la pauvre pécheresse qui succombe naïvement à sa faiblesse.

— On voit bien que vous n’êtes pas marié, mon cher, répondit Auguste ; vous ne parleriez point ainsi. Nous autres maris, ajoutait-il en montrant Adhémar, nous ne confondons point l’intention avec le fait ; il y a certaines conséquences qui nous rendent plus indulgents pour les torts de coquetterie que pour les faiblesse sentimentales.

— Et ce prince Raniesky, a-t-on de ses nouvelles depuis sa disparition accusatrice ? demanda le président, désirant donner un autre tour à la conversation.

— Certainement, reprit Auguste, il passe sa vie chez notre ambassadeur à Stockholm ; mais il ne parle jamais de son