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— Léonie, vous souffrez, ô ciel ! qu’avez-vous ?

Je ne répondis rien, mes yeux se remplirent de larmes, je détournai la tête pour les cacher, et c’est dans cette disposition qu’il me fallut prendre un air riant pour danser. Alfred n’était pas moins malheureux que moi. Son tourment était visible, ne pensant qu’à deviner la cause de mon chagrin, l’interprétant de cent manières, il manquait à tous ses devoirs de danseur, il brouillait si bien les contre-danses que personne ne pouvait s’y reconnaître ; enfin ce supplice finit. De retour à ma place, il s’assit près de moi, et tandis que madame de Nelfort répondait à tous ceux qui venaient la saluer, j’eus le temps de dire à Alfred ce que j’avais promis à mon père. Tout autre que lui voyant ce que me coûtait ma soumission, en eût été touché, mais Alfred était plus violent que sensible ; son amour-propre une fois irrité, réprimait tous les mouvements de son cœur ; et sans réfléchir sur l’impossibilité de résister aux volontés de mon père, sans être ému de ma douleur, il m’accusa d’avoir voulu soumettre son cœur pour l’humilier, d’avoir feint quelqu’intérêt pour lui, afin que