Page:Nichault - Le Moqueur amoureux.djvu/266

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

transporter dans le tombeau de ma famille : je désire être placé à côté de ma mère. Et, j’ai honte de te l’avouer, dans ce moment où de plus solennelles pensées devraient seules occuper mon cœur, il est rempli d’une image dont la mort même ne peut me distraire. Cette image, qui m’a toujours suivi, j’ai cent fois essayé de la retracer ; enfin j’y suis parvenu, à l’aide d’un jeune peintre attaché à notre expédition : ce portrait ne m’a point quitté, je veux qu’il repose sur mon cœur longtemps après qu’il aura cessé de battre ; mais la crainte de ce que l’on pourrait conjecturer si l’on trouvait sur moi ce pieux souvenir me fait un devoir de m’en séparer dans ce triste moment. C’est le plus douloureux sacrifice que je puisse faire pour elle ; et si j’ai le courage de m’y soumettre, c’est dans la confiance que tu rendras ce précieux dépôt à ma tombe. Oui, tu le déposeras toi-même sur mon cœur avant que je sois enseveli pour jamais, et puis tu reviendras quelquefois verser des pleurs sur ton meilleur ami. Adieu… Je m’affaiblis… peut-être… Maurice, dis-lui combien je l’aimais… regrette-moi près d’elle… et ma mort sera douce.

» ALBÉRIC. »