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à les tromper. Elle s’enferma chez elle, en prétextant une indisposition légère.

La nuit vint ajouter encore à tout ce qu’elle souffrait. Les tristes visions qui accompagnent l’inquiétude, un vague pressentiment, l’avertissaient des malheurs attachés à un amour qui était blâmé, même avant d’être connu. Elle sentait que cette faiblesse allait lui coûter ses amis, sa considération peut-être, sans lui assurer le bonheur d’être aimée, tant la légèreté d’Albéric lui inspirait de défiance. Elle était accablée sous le poids de tant de craintes diverses, lorsque mademoiselle Rosalie entra chez elle et lui remit une lettre, Mathilde l’ouvrit en tremblant, car l’empreinte du cachet portait les armes du comte de Varèze. Dans l’excès de son émotion, et craignant de la laisser voir, elle attendit que mademoiselle Rosalie sortît de sa chambre pour lire ce qui suit :

« Je ne vous apprends rien, madame, en vous disant que ma vie était à vous ; qu’il vous appartenait d’en faire un enchantement ou un supplice. Vous le savez, et pourtant nul aveu, nul serment n’est sorti de ma bouche. Mais un tel empire ne peut être ignoré de celle qui l’exerce ; vous l’auriez reconnu à tous mes efforts pour dompter le caractère qui vous déplaît, si l’espoir de vous intéresser un jour, ou la crainte de n’y jamais parvenir, n’avaient trahi mille fois ma pensée. Cet amour que vous dédaignez, madame, je l’a-