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— Je ne saurais être de cet avis, reprit M. de Varèze. La mine est inépuisable ; et l’on ne peut nier que si les Dorantes et les Philintes ont changé de costume, ils sont remplacés par des gens qui les valent bien. Croyez-vous que nos vieux entêtés et nos jeunes politiques, nos Vadius classiques et nos Trissotins romantiques ne soient pas tout aussi risibles ? Ah ! qu’on nous donne un Molière, et je m’engage à lui fournir plus de ridicules qu’il n’en a déjà immortalisés.

— J’espère qu’il commencerait par…

— Moi, n’est-ce pas ? interrompit Albéric. Comment donc ! je voudrais bien être assez divertissant pour cela. Mais je me rends justice ; il ne faut pas être dans le secret de ses défauts pour en amuser les autres. Je n’ai pas l’aveuglement convenable ; et puis je rirais de si bon cœur de ses leçons, que je cesserais bientôt de les mériter.

Alors on se mit à passer en revue les gens qui pourraient inspirer un second Molière. Les Célimènes de la nouvelle école, au ton brusque, au regard audacieux ; les Arsinoés, à l’air dédaigneux et pédant ; et cette foule d’ingénues de trente ans, que dix années de mariage et deux ou trois enfants n’ont pas encore déterminées à abandonner les chuchotements, la ricanerie, enfin toutes les manières des petites pensionnaires. Les galants de l’ancien régime, au parler doux, au sourire fin ; les élégants de l’empire, à l’air fier, aux attitudes belliqueuses, à cette galanterie impé-