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salle où un petit théâtre, décoré par nos plus habiles artistes, promet des proverbes ou peut-être un vaudeville. À l’empressement que les femmes mettent à envahir les meilleures places, aux coups de coude qu’elles se distribuent pour y arriver plus tôt, on pourrait se croire à l’entrée d’un véritable spectacle. Mais M. Ribet, qui a été à la comédie de société de la duchesse de L…, sait qu’en cette occasion la bonne compagnie ressemble beaucoup à l’autre ; et il a placé un piquet d’amis courageux pour s’opposer à l’envahissement des premiers rangs. Albéric offre son bras à la marquise d’Erneville, certain que Mathilde sera placée près d’elle, et qu’il se trouvera plus à portée de la voir. Dans cette intention, il refuse modestement toutes les places qui lui sont offertes, et va s’asseoir dans un coin de l’avant-scène, de façon à voir très-mal le théâtre et fort bien la salle. Lorsque toutes les femmes sont assises, mademoiselle Aspasie se lève, et faisant signe à la jeune personne qui tient une corbeille remplie d’éventails et de bourses, elle s’apprête à en faire la distribution en commençant par les plus beaux.

En cet instant, M. de Varèze causait avec M. de Lormier. Il cesse tout à coup de parler, l’autre en profite pour lui débiter son chapitre de vérités incontestables, sans s’apercevoir qu’Albéric ne l’écoute plus, et que, tout entier à ce qui se passe sur le visage de Mathilde, il épie le moment où elle ouvrira l’éventail