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vante les charmes de l’obscurité, et me dit, en laissant échapper un soupir, qu’on n’aime bien que dans l’ombre. Je lui demande d’un ton doux si elle a connu l’amour ; et comme je lui fais cette question toutes les fois que je la rencontre, elle a sa réponse toute prête, et je vois alors ses petits yeux s’humecter d’une larme qui tombe avec ces mots : « Je n’en ai connu que les peines ! »

— Ce qui est une manière honnête d’en quêter les plaisirs, interrompit madame de Cérolle ; et vous êtes ravi de cet aveu furtif. Je gagerais qu’avec votre patience à subir ses langueurs, elle est parfois tentée de croire que vous l’aimez.

— Parfois ! ah ! vous pouvez dire toujours.

— Eh bien, que ferez-vous de cette certitude ?

— Son bonheur et le mien ; je lui donnerai la douceur de me plaindre, en me réservant le plaisir de la fuir. Ah ! je ne suis point de cette classe de futurs éternels qui vont s’offrir de famille en famille sans jamais épouser, et qui se font mettre à la porte le jour où l’illusion cesse. Je hais ce qui trompe, et la sensible Évélina sait que je suis enchaîné par des serments qui ne me permettent pas de lui consacrer ma vie.

— Regardez, dit madame de Cérolle avec l’accent du dépit, je crois que voici la beauté qui pourrait vous demander compte de ces tendres serments. Ah ! mon Dieu ! comme elle est pâle ! Savez-vous bien que si elle