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un fournisseur fait payer l’intérêt du crédit ; au pauvre, il ne demande que l’addition juste. Et cependant, étrange anomalie des choses humaines ; celui qui achète en détail paie plus cher que celui qui achète en gros. L’entrée d’une pièce de vin fin ne coûte pas plus qu’une pièce de vin ordinaire ; le bois pris au stère est la fleur du chantier ; le bois en falourdes, le rebut du détail. Aux halles et marchés, les beaux morceaux sont pour les riches ; les morceaux inférieurs pour les pauvres. On frelate leur lait, leur café, leur tabac. Le marchand qui, pour dix sous, se dérange dix fois, se rattrape nécessairement sur la qualité de la quantité. Si celui que le sort condamne à toujours compter avec ses gros sous, en se donnant une compagne se donnait une charge et non une aide, on verrait bien peu de mariages d’ouvriers. Mais sur le même niveau l’on s’apprécie et l’on se dit : S’il arrive des enfants, notre travail en commun nous permettra de les élever… Ils sont bien forts, en effet, ceux qu’une douce affection et une sage économie unit !

À certains points de vue tristes, chez les riches l’ambition tue l’amour : « Les filles élevées dans l’argent, pour l’argent, en vue de l’argent, dit-on ont