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VOYAGE EN ORIENT.

hachée qu’elles pétrissent ensemble et qui sert pour le chauffage.

C’est avec ce combustible nommé gelley que les fours sont chauffés et les aliments préparés. Dans les classes inférieures, l’assujettissement des femmes à leur mari est bien plus grand que dans les classes élevées. Il n’est pas toujours permis à ces pauvres femmes de dîner avec les hommes, et, lorsqu’elles sortent en compagnie du mari, elles marchent presque toujours derrière ; s’il y a quelque chose à porter, c’est la femme qui en est chargée.

Dans les villes, quelques femmes ont des boutiques où elles vendent du pain, des légumes, etc. ; de sorte qu’elles contribuent autant et souvent même plus que le mari à l’entretien de la famille.

Lorsqu’un Égyptien pauvre désire se marier, son premier soin est la réalisation du douaire, qui comporte ordinairement la somme de vingt ryals (de douze à treize francs) ; si l’homme voit la possibilité de donner le douaire, il n’hésite guère à se marier, car il ne lui faudra que peu de travail de plus pour pourvoir à l’entretien d’une femme et de deux ou trois enfants. Dès l’âge de cinq ou six ans, les enfants sont utiles à la conduite et à la garde des troupeaux, et, ensuite, jusqu’à l’époque où ils se marient, ils aident le père dans son travail aux champs. Les pauvres, en Égypte, dépendent souvent entièrement, dans leur vieillesse, du travail de leurs enfants ; mais bien des parents sont privés de cette aide et se trouvent réduits à mendier ou à mourir de faim. Il y a peu de temps que le pacha, faisant le voyage d’Alexandrie au Caire, débarqua dans un village au bord du Nil ; un pauvre homme de l’endroit se saisit de la manche du vêtement du pacha, et tous les efforts des assistants pour lui faire lâcher prise furent vains. Ce pauvre homme se plaignait de ce que, ayant été autrefois à son aise, il se trouvait réduit à la dernière misère, parce que, arrivé à la vieillesse, on lui avait enlevé ses fils pour en faire des soldats. Le pacha, qui examine ordinairement avec attention les demandes qu’on lui