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VOYAGE EN ORIENT.

d’autres des fez modernes peints en rouge et à glands dorés. C’est la hauteur d’un homme ordinaire et la forme d’un corps sans bras ; mais, au-dessous de la coiffure, la pierre est plate et couverte d’inscriptions ; des couleurs vives et des dorures distinguent les plus modernes et les plus riches. Elles seules sont debout ; celles des rayas et celle des francs, placées dans certains quartiers, sont couchées à terre. Ces pierres sont donc presque des images, au point qu’après le massacre et la proscription des janissaires sous le règne de Mahmoud, on fit tomber la tête ou plutôt le turban de toutes celles qui indiquaient les tombes des anciens soldats de ce corps. On les reconnaît aujourd’hui à cette mutilation sacrilége.

Pour tout dire et pour épuiser ce sujet, signalons encore la représentation d’une colombe dorée qui orne la proue du caïque de l’empereur. Du temps de d’Ohsson, c’était un aigle qui décorait la barque du sultan régnant ; peut-être chacun d’eux adopte-t-il un oiseau symbolique ; en tout cas, c’est le seul qu’il soit permis de représenter. Maintenant, comment expliquer encore l’existence première des petites figures qui servent pendant le Ramazan, aux spectacles de Caragueuss. Ce sont à la fois des marionnettes et des ombres chinoises. Leurs couleurs ressortent parfaitement derrière une toile fine très-éclairée, et tous les costumes des différents peuples et des différentes professions sont imités avec une perfection qui ajoute à l’attrait du spectacle ; le principal personnage seul est, comme notre Polichinelle, invariable dans sa forme… et dans sa difformité.


X — LA VIE DOMESTIQUE CHEZ LES ÉGYPTIENS


La vie domestique des classes inférieures est, en général, si simple, comparée à celle des classes plus élevées, qu’elle n’offre que fort peu d’intérêt.

À l’exception d’une petite partie qui demeure dans les villes, la majorité des classes inférieures se compose de gens nommés fellahs (agriculteurs). Ceux qui habitent les grandes villes, et