Page:Nerval - Voyage en Orient, II, Lévy, 1884.djvu/287

Cette page a été validée par deux contributeurs.
275
APPENDICE.

son où les méchants doivent attendre leur arrêt définitif[1], cette nuit est ainsi nommée leylet-el-wahed (nuit de la solitude).

Une autre cérémonie nommée celle du sebbah (du rosaire), a lieu à cette occasion pour faciliter l’entrée du défunt dans un état de béatitude ; elle dure de trois à quatre heures. Après l’eshi (chute du jour), quelques fakirs, souvent au nombre de cinquante, s’assemblent dans la maison mortuaire ; s’il n’y a ni cour ni grande pièce pour leur réception, on étend des nattes devant la maison, et ils s’y asseyent.

Un de ces fakirs porte un sebbah (rosaire) composé de mille grains, de la grosseur d’un œuf de pigeon, ou environ. Ils commencent la cérémonie en récitant le sourat El-Mulk ; puis ils répètent trois fois : Dieu est unique ! Après quoi, ils récitent le sourat El-Faluk (avant-dernier chapitre du Coran) et le premier chapitre Fathah, — Ils disent ensuite trois fois : « Ô Dieu ! favorise entre tes créatures, notre seigneur Mahomet, sa famille, ses compagnons et conserve-les ! » Ils ajoutent : « Tous ceux qui te célèbrent sont les diligents, et ceux qui négligent de te célébrer sont les négligents. » Puis ils répètent trois mille fois : « Il n’y a de Divinité que Dieu ! » L’un d’entre eux tient le rosaire et compte chaque répétition de ces mots, en faisant glisser un de ces grains à travers ses doigts. Après la répétition de chaque mille fois, souvent ils se reposent et prennent le café. Ayant complété le dernier mille, s’étant reposés et rafraîchis, ils répètent cent fois : « Je célèbre la perfection de Dieu et sa louange ! » — Puis un nombre égal de fois : « Je demande pardon à Dieu le grand ! » après quoi, ils disent cinquante fois : « Je célèbre la perfection du Seigneur, l’Éternel, la perfection de Dieu, l’Éternel ! » — Puis ils répètent ces mots du Coran : « Célèbre les perfections de ton Seigneur, le Seigneur de la puissance, en le relevant de ce qu’on lui attribue (les chrétiens et les autres) d’avoir un fils, ou

  1. Sate, dans son discours préliminaire, sect. IV, a énuméré les opinions des musulmans au sujet de l’état des âmes dans le temps qui s’écoule entre la mort et le jugement.