claire, fraîche, argentine et narquoise grésillait toujours à côté d’elle, lançant des perles qui retombaient dans la vasque avec un bruit très-gai. Et la soif croissait : la reine, haletante, n’y résistait plus.
Tout en poursuivant son discours, voyant Soliman distrait et comme appesanti, elle se mit à se promener en divers sens à travers la salle, et par deux fois, passant bien près de la fontaine, elle n’osa…
Le désir devint irrésistible. Elle y retourna, ralentit le pas, s’affermit d’un coup d’œil, plongea furtivement dans l’eau sa jolie main ployée en creux ; pois, se détournant, elle avala vivement cette gorgée d’eau pure.
Soliman se lève, s’approche, s’empare de la main luisante et mouillée, et, d’un ton aussi enjoué que résolu :
— Une reine n’a qu’une parole, et, aux termes de la vôtre, vous m’appartenez.
— Qu’est-ce à dire ?
— Vous m’avez dérobé de l’eau… et, comme vous l’avez judicieusement constaté vous-même, l’eau est très-rare dans mes États.
— Ah ! seigneur, c’est un piège, et je ne veux point d’un époux si rusé !
— Il ne lui reste qu’à vous prouver qu’il est encore plus généreux. S’il vous rend la liberté, si malgré cet engagement formel…
— Seigneur, interrompit Balkis en baissant la tête, nous devons à nos sujets l’exemple de la loyauté.
— Madame, répondit, en tombant à ses genoux, Soliman, le prince le plus courtois des temps passés et futurs, cette parole est votre rançon.
Se relevant très-vite, il frappa sur un timbre : vingt serviteurs accoururent, munis de rafraîchissements divers, et accompagnés de courtisans. Soliman articula ces mots avec majesté :
— Présentez à boire à votre reine !