Page:Nerval - Napoléon et la France guerrière, 1826.djvu/27

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Il fallut sous les fers plier ton bras vainqueur ;
Déchiré sans combat par des monstres perfides,
L’athlète de Crotone expira sans honneur : —
Et toi, ne sens-tu pas, comme des loups avides,
Toutes les passions qui déchirent ton cœur.

À son arbre attaché, quelle fut sa pensée
Quand il se ressouvint de sa vigueur passée,
Dont les premiers essais étonnaient l’univers ?…
Et toi, que pensas-tu, quand battu par l’orage,
Tu te vis, de si loin, jeté sur le rivage,
Comme un débris vomi par l’écume des mers ?


*

Mais pourquoi par le temps laisser ronger tes armes ?
Pourquoi laisser couler ton âme dans les larmes ?[1]
Reprends le glaive encor, sors de ton long repos :
N’as-tu donc plus le bras qui lance le tonnerre,
N’as-tu plus le sourcil qui fait trembler la terre,
N’as-tu plus le regard qui produit les héros ?

Lève-toi ! c’est assez gémir dans le silence !
De tes lâches gardiens crains-tu la vigilance ?

  1. Dem alle Kraft seiner Seele in Thränen ausfließt.
    Zimmermann, la Solitude, ch. III.