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MONROSE


peignent, à mille aventures arrivées sous mes yeux ; ce qu’ils disent de son bonheur m’a paru bien moins vraisemblable. On voit partout des jaloux, des bourrus, des inconstants, des perfides ; on ne voit nulle part ces hommes charmants, si bien faits, si tendres, si discrets ; et l’on ne cite pas une seule de ces unions si fortunées qui, liant les charmes de la figure et les perfections de l’âme par une chaîne de plaisirs, sont inaccessibles aux injures de l’habitude, de la monotonie des jouissances et de la corruption du siècle. Mais j’ai deviné que ce dont les vers et les romans honnêtes ne parlent point, devait être le vrai secret de cette passion tour à tour délicieuse ou funeste, et que c’était absolument ce secret qu’il s’agissait de connaître pour savoir à quoi s’en tenir. Croit-on voir un spectre affreux ? il n’est besoin que de courir à l’objet pour se convaincre qu’une cause très-simple opère l’épouvantable prodige. On admirerait moins un tour de quelque fameux escamoteur, si l’on avait la très-naturelle clef du miracle qu’il opère. Dans ces principes, chevalier, je me suis dit : « C’est à la simple cause, c’est à la clef naturelle qu’il me faut recourir pour savoir enfin ce que c’est que cet amour qui trouble les têtes, qui martyrise les cœurs, qui promet tant