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MONROSE


je me gardais bien de bouger, ni de mêler nos jambes. Troussé sous moi comme une volaille rôtie, je cheminais tristement, sans donner à madame la baronne le plus petit sujet de plaintes. « Mon Dieu, monsieur le chevalier, me dit-elle, mettez-vous plus à votre aise : étendez-vous. » En même temps, pour m’en démontrer la facilité, la voilà qui s’écarte et se trousse assez haut pour qu’à la faveur du flambeau d’une voiture qui croise la nôtre, je puisse voir les deux tiers des plus maigres échasses. « Assurément, poursuit-elle, ce n’est pas l’entremêlement, comporté par le vis-à-vis, qui m’a choquée, ce soir, de la part de ce polisson d’abbé, mais c’est… je ne sais quel ton, qu’à propos de la même nécessité… des gens comme vous, par exemple, sont incapables de se permettre avec une femme de ma sorte… Point de façons ; allongez-vous, mon fils… Ne craignez pas de m’incommoder… Votre chapeau vous embarrasse : je veux le prendre sur mes genoux ; donnez… — Madame, je ne souffrirai pas… — Donnez, vous dis-je ! » Et de me disputer mon pauvre chapeau, si frais, si bien retapé, dont elle joue à martyriser la plume ! Il vaut mieux le lui abandonner, céder à tout, glisser enfin tout de leur long mes jambes, qui se trouvent aussitôt embrassées et presque

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