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genou ; les rois des Arabes et de Saba (sud de l’Arabie) offriront des présents[1]. »

Pour nous faire une idée de la richesse relative de l’Arabie au début du viie siècle et de son déclin, aidons-nous d’abord d’une contrée beaucoup mieux connue, en rappelant, d’après M. de Morgan, comment s’est formée et perdue la prospérité de la Chaldée.


 À l’époque de sa splendeur, c’est-à-dire vers le quarantième siècle avant notre ère, la Chaldée jouissait d’une abondance prodigieuse ; coupée en tout sens de canaux, largement arrosée, couverte de villes et de villages, elle pouvait, à juste titre, passer pour le paradis terrestre.

 Tant que durèrent les dominations chaldéenne et assyrienne, la Mésopotamie fut d’une incroyable richesse ; mais peu à peu, depuis la domination des Perses achéménides jusqu’à celle des Perses sassanides, la fertilité diminua par suite du comblement des canaux. Enfin, arrivèrent les musulmans qui, avec leur imprévoyance habituelle, donnèrent le coup de grâce à ce grenier de l’Orient. La population disparut. Aussi aujourd’hui ne compte-t-on plus qu’environ quatre habitants par kilomètre carré, tandis que les plaines fertiles de la vallée du Nil en comptent plus de deux cents… L’Euphrate et le Tigre, tout comme le Nil, sortent, périodiquement chaque année, de leur lit, et leurs eaux couvrent le pays. Il serait donc aisé, en rétablissant les anciens canaux, de rendre la fertilité à ces vastes plaines ; mais il faudrait des bras pour de semblables travaux[2].


On peut en dire autant, proportion gardée, du Hidjaz et de l’Arabie. Bien des régions sont couvertes de ruines de notre ère et montrent qu’on avait pu y créer de nombreuses oasis, lorsqu’on avait le courage et la patience d’y creuser des puits. D’après le Père Lammens :


Au début de l’hégire, les Arabes, devenus riches et possesseurs de troupeaux d’esclaves, tenaient souvent à se donner la satisfaction de devenir propriétaires sur le théâtre même où jadis ils avaient gardé les

  1. Ps. lxxi, 9-10.
  2. Notes sur la basse Mésopotamie, dans la Géographie, Bulletin de la Société de Géographie, Paris, 15 octobre 1900, p. 252, 259.