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Barrouge seraient bien reçus s’ils me parlaient dans cette maison comme ils le faisaient là-bas !

Mais voici que mon radieux bonheur s’ennuage : Assise à table et toute sa figure rechignée, contractée par une grimace méchante qui ne se peut traduire que par : « J’attends et me vexe », — j’aperçois Adrienne, ma belle-sœur, le type de la « femme forte »… et médiocrement indulgente, — de caractère, dirai-je : rêche ? — et de trop virile énergie. Elle a quelque lointaine ressemblance avec la cousine « Raoula » qu’elle estime infiniment : Comme l’épouse Roffieux, elle n’a jamais eu tort cinq minutes dans sa vie, — est parfaite dans ses relations avec tout son entourage ; — (ô l’étonnante, l’effroyable espèce que celle des gens parfaits ! — mais sa perfection même attriste et on lui souhaiterait un tout petit défaut, — aimable.

Je ne sais pourquoi — et c’est très mal de ma part, — elle m’a, de tout temps, fait penser à ce steamer nommé le « Frigorifique », spécialement aménagé pour transporter les viandes de la Plata et dont les cales se maintenaient, même sous l’Équateur, à la température de zéro. Quand elle me regarde, — fût-ce par un jour de canicule, je crois toujours que je vais tousser. Comment mon malheureux frère n’est-il pas devenu phtisique auprès d’elle ? — Quand il m’est donné d’admirer ses yeux gris, d’un gris de ciel lapon, son profil vaguement junonien, toute sa belle personne ample sans être grosse, grande sans exagération, harmonieuse