Page:Nau - Force ennemie.djvu/156

Cette page a été validée par deux contributeurs.

pâleur « distinguée » de sa calvitie régulière, aux marges bien dessinées. Ses yeux bleu foncé, d’une franchise un peu fatigante, ont l’éclat de certaines fleurs artificielles. Il parle d’une voix profonde et harmonieuse de diseur :

— Eh bien, mon pauvre Philippe, je te retrouve donc ici ! L’endroit n’est pas plus gai qu’il ne faut mais la vie que tu y mènes te réussit à merveille puisque l’on a constaté dans ton état une grande amélioration. Tu n’avais, par malheur, que trop besoin de recueillement.

» Dans une société « bien réglée », dans notre admirable monde moderne où le libéralisme a pour contrepoids une inflexible justice, chacun doit occuper la place qu’il mérite, au moins momentanément et supporter d’un cœur vaillant quelques dures mais bienfaisantes et indispensables épreuves. Que dis-tu de cet établissement où tu ne demeureras, je te le jure, que le temps strictement nécessaire ?

— Je le trouve exquis, délicieux ! Je ne veux plus le quitter jamais !

Une petite lueur d’inquiétude passe dans les yeux trop francs de l’apôtre. Mais je reprends :

— Quant à l’affliction que tu ressens à me retrouver ici, j’aimerais à t’en consoler… mais c’est toi-même qui te l’es courageusement infligée en me casernant, sans épargner ta sensibilité…

— Mon cher ami, je n’ai jamais agi que pour ton bien, cette fois comme les autres.