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s’alimenterait gloutonnement de toute ma nourriture et je n’aurais plus rien pour ce soir ! Faites-lui chauffer les pommes de terre d’hier avec le morceau de « bouilli ». Rien d’autre ! C’est une ruine, une vieille aliénée de cet appétit !

Robertine prend par le bras la bonne femme qui pleure mais s’apaise dès que la peu décorative jeune personne lui a promis de lui « fourrer tout plein de ça qu’est bon ».

— Vous comprenez, reprend M. Frédéric, je ne puis pas mettre les plats d’or dans les plats d’argent pour une vieille aliénée qui n’a plus le sou. Bien sûr que ça a eu des « moyens » et gros comme une meule, dans le temps. Mais la « mauvaise administration », le vice, la folie, peut-être la boisson, tout cela réuni a mangé le plus clair du capital. Le tuteur de cette famille de déments, — un notaire, — est un sentimental… (Oh ! un notaire sentimental ! Un crocodile qui s’est payé une muselière, alors !) et tient absolument à ce que ses pupilles soient traités comme des parents de ministres, chez le Dr  Froin. Ça revient à… à… horriblement cher ces chambres à part, ces régimes dits fortifiants ekcékéra. Je suis sûr que les revenus actuels sont dépassés. Hier j’ai acheté à Robertine, pour la mère Charlemaine, deux de ses costumes fatigués mais encore bons qu’elle mettait pour les « grands nettoyages ». Ils m’ont coûté dix francs les deux, c’est une somme ! En serai-je seulement remboursé ?