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UN DIMANCHE AU CHANTIER

de lumières exquises. Son cœur voit le premier. C’est Elle ! Il approche doucement, sans bruit. La vague fait « Chut !… Chut !… » à chaque pression molle de l’esquif chargé de teintes purpurines.

Mademoiselle Valade est penchée près du rivage. D’une main, elle tient une ramure de cèdre. De l’autre, elle écarte des nénuphars et se mire dans du bleu entouré par la cire des fleurs épaisses. Plusieurs papillons noirs, aux ailes striées d’orange, sont posés sur la barre de son canot et regardent, aussi, les tresses, bouquet inconnu pour eux, mais combien désirable. Les baisers plus rapides du courant, sous les doigts de la fillette, lui font relever la tête.

— C’est vous !

— Comme vous l’voyez, la demoiselle.

— Que j’sus donc fière !

— Moé pareillement.

Les deux canots se touchent, s’arrêtent sur un lit de mousse et de cailloux blancs. Mlle Valade suggère :

— Si on débarquait… Voyez-vous ce beau pin, parmi les roses sauvages. Un vrai parasol. On s’rait ben, à l’ombre…

Tous deux sautent par terre et s’acheminent, s’étendent sous l’arbre paradisiaque.

L’Épicier regarde son amie, baisse la vue,