Page:Nansen - À travers le Grönland, trad Rabot, 1893.djvu/335

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
325
descente vers l’ameralikfjord.

jaunes, effet du froid survenu il y a quelque temps. Maintenant, pendant la journée, le thermomètre s’élève à l’ombre à +12°, et les nuits sont douces comme en Norvège à pareille époque.

Les terrasses sont découpées transversalement par de profonds ravins creusés par des ruisseaux ; dans les endroits où leurs pentes sont couvertes de broussailles, la traversée n’en est pas facile.

La vallée que nous suivons est très intéressante pour des géologues. Un peu plus bas, un éboulement déterminé par le courant de la rivière dans ces terrasses meubles a mis à jour de nombreux subfossiles (Mytilus edulis). La présence de ces coquilles nous explique le mode de formation de ces terrasses. Jadis cette vallée était un fjord ; l’argile et le gravier apportés de l’inlandsis par les torrents ont peu à peu comblé l’extrémité supérieure de la baie, et ultérieurement le sol a subi un mouvement d’exhaussement.

Le 26 au soir, nous arrivons à l’extrémité inférieure de la vallée. Le lendemain nous sommes debout de grand matin, et avalons en hâte notre dernière portion de thé, un peu de pain et de pemmican. Des vingt-cinq tablettes de ce hachis que nous avons emportées, nous n’en avons plus maintenant que dix-huit. Le restant, Sverdrup et moi en aurons besoin pour le voyage jusqu’à Godthaab ; il est donc nécessaire de nous mettre aujourd’hui à la portion congrue.

Ap rès le déjeuner, Sverdrup et Balto s’occupent immédiatement de la construction du canot. Pendant ce temps je prends quelques observations, et les autres font leurs préparatifs pour aller chercher dans le haut de la vallée les bagages abandonnés au pied de l’inlandsis. Chacun de ceux qui doivent partir reçoit des provisions pour la journée : du pain, du chocolat mélangé à de la viande et du pâté de foie pour deux repas.

À cette troupe, ainsi qu’à Balto qui la rejoindra plus tard, je remets une courte instruction. Les camarades doivent, avant tout, rapporter les instruments, les journaux de route, le restant des provisions, et prendre ce qu’ils pourront porter des autres bagages.

Aussitôt après, la petite troupe se met en marche par un temps magnifique, accompagnée de nos meilleurs souhaits, pendant que Sverdrup, Balto et moi nous nous occupons du bachot. Je pensai