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notre vie sur l’inlandsis.

pas trop longue. Quand le thé ou’le chocolat est prêt, je réveille les autres, nous déjeunons, bien enveloppés dans les sacs. Le repas achevé, on fait rapidement les préparatifs du départ, on nettoie les patins des traîneaux, on abat la tente, charge les bagages, fait des observations, puis en route !

Après quelques heures de marche, halte et second déjeuner, composé d’une tablette de chocolat à la viande pour chaque homme. Une fois réconfortés, nous continuons jusqu’à l’heure du dîner. Nous avalons rapidement ce repas, assis sur les traîneaux, puis repartons. Dans l’après-midi, collation composée également de tablettes de chocolat à la viande. A cinq heures, seconde collation. Nous marchons ensuite jusqu’au moment où le campement est établi, avec une petite halte pour prendre une nouvelle tablette de chocolat.

Sur l’inlandsis il n’était pas précisément agréable de faire des observations astronomiques. Le maniement des instruments était particulièrement difficile avec les moufles épaisses dont nous devions avoir les mains garnies. Lorsque les observations devaient être prises avec le degré de précision le plus rigoureux, nous nous dégantions : mais en pareille circonstance il fallait veiller à ce que les doigts ne restassent pas attachés au métal. Nos observations au sextant comme au théodolite furent toujours très exactes. L’observation avec le sextant et l’horizon artificiel était surtout délicate ; le vent amoncelait rapidement de la neige sur le toit recouvrant le bain de mercure, et si l’on voulait voir quelque chose il fallait se hâter.

Dès que nous nous étions arrêtés pour camper, tout le monde travaillait à dresser la tente et à renforcer par des prélarts la partie de notre abri exposée au vent. Le soir, le seul travail de Ravna, et, je peux dire, le seul auquel il se soit livré pendant tout le voyage, à part celui du halage, était de remplir de neige le bidon. Sa longue expérience des montagnes lui avait appris à reconnaître la neige qui fond le plus rapidement. Aussitôt que la caravane s’est arrêtée, le bonhomme s’en va sans mol dire à l’écart avec la gamelle, et creuse un trou pour arriver à la vieille neige, dont la fusion produit une plus grande quantité d’eau que celle de la neige fraîche. Ce travail terminé, Ravna rapporte l’appareil au campement, puis, si la tente est déjà dressée, va s’accroupir dans un coin pour ne plus bouger