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les conquêtes du commandant belormeau

parurent sur la route ; autant qu’il sembla à la jeune fille, c’étaient un homme et une femme qui s’avançaient lentement, appuyés l’un sur l’autre. Elle soupira d’impatience… ce n’était pas encore ce qu’elle attendait.

Soudain, elle sursauta comme si un serpent l’eût mordue dans les ténèbres. Un éclat de voix d’une voix sonore qu’elle connaissait bien, venait de parvenir jusqu’à elle. Un rire léger de femme y répondit. Le couple était tout près. Il passa sans la voir ; ô surprise ! elle avait reconnu le commandant Belormeau et Lise Vanderck, la petite lingère, qu’on ne disait point sage.

Un froid glacial gagna le cœur de Valentine ; elle dut s’appuyer à la muraille rugueuse pour ne pas tomber. Elle y demeura muette, immobile, tant que les promeneurs furent en vue ; puis elle s’enfuit, courut jusqu’à l’église et s’y jeta comme en un refuge.

Une crise de jalousie aiguë déchirait le cœur de la pauvre enfant.

Prostrée dans son banc, elle pleura amèrement. Son rêve était si beau ! Il l’avait emportée si haut sur ses ailes que la déception lui apparaissait intolérable.

Elle était blessée, révoltée, et l’idole gisait à terre, brisée comme un vase d’argile. Au milieu de cette tempête, une lueur subsistait : le sentiment de ne pas s’être trahie…

Remerciant Dieu qui avait permis que cette preuve lui arrivât, à la minute décisive, la pauvrette frissonnait d’une frayeur rétrospective à la pensée qu’elle eût pu être éclairée plus tard… trop tard !

— Oh ! j’en serais morte de honte ! murmura-t-elle, en enfouissant son visage brûlant entre ses mains.

Le temps passait ; la nuit était devenue complète. Le vieux sacristain entra et secoua ses clefs, pour avertir l’inconnue, qu’il entrevoyait dans l’ombre, de l’heure de la fermeture.