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les conquêtes du commandant belormeau

dant, avec sa facilité accoutumée, s’éprit lui-même de Valentine ; elle revêtait, à ses yeux, le charme par excellence ; elle l’admirait sans réserve et l’encens qui montait de ce cœur candide, lui était infiniment agréable.

Il ne la voyait guère sans témoins ; toujours la mère ou l’aïeul étaient en tiers ; il ne pouvait, comme avec Minna, mettre directement, la conversation sur le thème qui l’occupait, mais ses yeux parlaient pour lui et tenaient à Valentine, un bien éloquent langage.

Partout, elle rencontrait ce regard d’homme ; il la suivait, par la pièce, quand elle servait le café dans les tasses de porcelaine transparente, et quand elle sortait, il était bien rare qu’elle ne trouvât pas le commandant sur son chemin.

La jeune fille éprouvait un trouble grandissant.

Quoique les lèvres du commandant Belormeau fussent demeurées muettes, elle croyait à son amour, aussi fermement que si elle en avait reçu l’aveu.

Dans la naïveté de son cœur, Valentine n’avait jamais pensé que ce sentiment pût être un passe-temps sans conséquence, un plaisir d’un instant. Pour elle, un grand amour, ne pouvait trouver, son aboutissement logique que dans le mariage ; elle vivait donc dans l’attente fiévreuse du jour, où le commandant demanderait sa main.

Être sa femme !… Vivre de sa vie dans le monde brillant qu’il lui ferait connaître ! Cette évocation la grisait délicieusement. Cependant, la pensée de Philippe, qu’elle avait cru pouvoir chasser comme un souvenir importun, l’obsédait au milieu de ses rêves et prenait, dans sa conscience, la douloureuse acuité d’un remords.

Valentine se gardait bien de laisser deviner ce qui se passait en elle. Dans sa mère, son grand-père, sa cousine, elle devinait d’instinctifs ennemis de son nouveau bonheur ; quant à Dieu, qui eût dû être son