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les conquêtes du commandant belormeau

Il y régnait donc un demi-jour verdâtre qui avait un air de mystère et Mlle Herminie n’éprouvait pas beaucoup moins d’émoi que si elle eût couru quelque romanesque aventure.

L’œil-de-bœuf était assez haut placé. La bonne demoiselle attira une escabelle et eut le regret de constater qu’elle était boiteuse. Cette découverte la fit réfléchir un instant. La coutume de grimper lui manquait, comme on le peut croire et ses jambes avaient eu vraiment tout le loisir de se rouiller.

Mlle Herminie considéra, un instant, d’un air perplexe, l’escabelle à l’équilibre instable…, qu’adviendrait-il, si elle se laissait choir ?

Pourrait-elle se relever sans secours et comment expliquer à Benoîte, sa présence et son occupation, en cet endroit ?

Pour si peu que Mlle de Batanville semblât tenir de notre mère Eve, elle était assez sa fille pour que la curiosité l’emportât.

Sans accident, sinon sans peine, elle monta sur le tabouret, ouvrit la fenêtre avec beaucoup d’effort et écartant les branches dépouillées de la vigne-vierge, jeta un regard curieux à son jardin.

Elle eut du plaisir à revoir son tranquille enclos. Un pâle rayon de soleil filtrait au travers de la brume et plaquait d’or la mousse qui feutrait les troncs de ses marronniers et de ses tilleuls. Le vieux cèdre du Liban qui s’élevait majestueusement vers le ciel, lui parut plus vert et plus touffu que de coutume. Enfin elle constata avec satisfaction que le massif de lauriers-tins était couvert de fleurs.

Un pas alerte, qui fit crier le sable bien ratissé de l’allée, rappela Mlle Herminie à l’objet de son investigation.

Le commandant Belormeau, avant de reprendre son service, profitait du beau temps pour fumer son cigare, en arpentant le vieux jardin.