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DE LA FOI 9^5

La sagesse sera donc le refus de vivre. Voici la découverte du sage, sa trouvaille incomparable : on peut aller de la naissance à la mort en évitant tout ce qui s'offre sur le chemin ; il faut marcher tout droit, bien raide, les yeux fermés. Soigneusement proscrire de son cœur toute passion, se diminuer de tout ce qu'on pourrait être ; si se présente l'occasion d'une haine, mettre à la place non pas de l'amour, mais de l'impassibilité : sentiment qui sert à tout, substitut de toute vivacité, de toute activité de l'âme. Mais à la fin, car vous êtes homme, il faut faiblir, il faut pécher, il faut n'être plus celui que vous deviez être ; et du coup votre sagesse tombe par terre ; elle s'efibndre ; puis- qu'elle consiste à ne pas broncher, la première infraction que vous y faites, la brise toute. On entend un éclat de rire : vous voilà tout seul avec votre faute. Rien de plus comique que le sage qui vient de pécher ; il n'avait aucune idée de ça ; sur ses tablettes il n'y avait que " l'honnête " et

    • le juste ". Il regarde autour de lui avec un

étonnement grotesque ; il est dans le mal comme quelqu'un qui se trouve brusquement assis dans le ruisseau.

La morale catholique, sa profondeur, c'est qu'elle a su ménager en elle une place au mal. — On n'y peut rien : nous sommes faits pour pécher, au même titre que pour être justes. De même qu'il a deux yeux et qu'il marche debout,

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