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840 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

conspuant, d'une seule voix, ton complet jaune serin ? Et tes fautes d'orthographe mises au jour par ta belle corres- pondante ? Et ton ignorance crasse épluchée, cosse à cosse, par qui voulut en prendre la peine ?

Je donne des coups de poing autour de moi, je brandis le tisonnier, je pousse, de ma voix sans timbre, des cris qui prétendent effrayer. Mais j'ai des souvenirs tout partout : à califourchon sur le nez, suspendus à mes cheveux et blottis dans mes poches.

Alors, je prends la plume, et les couche sur le papier. Je les relis... Ils ne m'incommodent plus. Ils ne me sont plus de rien. Je reste enchanté de moi : un homme tout à fait distingué.

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  • *

��Voici venir les douces chaleurs, les jours de gai soleil. Je puis laisser enfin l'air venir jusqu'à moi, lorsque assis à ma table, je travaille.

Cette table, je l'approche le plus possible de la fenêtre, attiré par ces gens singuliers, mes voisins, mes concitoyens, que de tout un hiver je n'ai vus, emmitouflés qu'ils étaient dans de lourds manteaux, blottis sous les parapluies, cou- rant par la gelée et par la nuit tôt venue.

Qu'ils sont nombreux, qu'ils paraissent bizarres, ces hommes et ces femmes dont les uns marchent d'un pas alenti et dont les autres séjournent au milieu de la rue. En hiver, la mine méfiante, ils se ratatinent et cachent d'eux tout ce qu'ils peuvent. Mais à présent, leurs sourires se font affables, leurs regards se croisent et se saluent. Les femmes échancrent leurs corsages et laissent voir, de leur

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