Page:NRF 8.djvu/695

Cette page n’a pas encore été corrigée

CHRONIQUE DE CAERDAL 689

Bonté d'homme qui fait la beauté de l'œuvre, aux yeux de tous, excellence qui ne peut être contestée. Les hommes ont tant besoin d'une morale, uni- versellement, qu'ils s'en font une de l'art, à défaut d'une autre et par prédilection, dès que l'artiste y prête. Enfin, s'il n'est pas le plus grand des musi- ciens, Beethoven est le grand homme de la musique.

��§

��Le grand homme est l'homme de gloire, qui agit sur les autres. Le peuple seul fait les grands hommes, comme il fait seul les dieux : je veux dire qu'il les révèle : je veux dire qu'il les adore. Après les avoir méconnus, il les connaît et seul les fait assez connaître : il les aime, il les sert, et leur garde ou leur rend la vie en les aimant. Leur règne est son œuvre ; et les eût-il crucifiés vivants, il fait leur vie immortelle.

L'insupportable et juste prétention de ceux qui ne savent pas la musique, a toujours été d'en juger. Ils veulent des grands hommes, après tout, et c'est bien légitime. Mais ils ne veulent pas comprendre qu'ils ont droit à sentir, et rien de plus. Sentir : abdiquer. Dans leur jugement, ce n'est même pas leur goût qui parle : ils n'expri- ment qu'une certaine pente de la race et du temps. Eux-mêmes, n'y sont presque pour rien. Point

�� �