Page:NRF 8.djvu/688

Cette page n’a pas encore été corrigée

682 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

avec la Croix, avec les Plaies, avec les Anges ; et je crois entendre Napoléon à Sainte Hélène, en écoutant Beethoven, un Napoléon armé d'amour, pour la conquête d'un paradis de gloire et de vertu.

Souvent, les vertus de Beethoven, pour musi- cales qu'elles soient, sont moins admirables par la musique même que par le sentiment et la pensée de l'artiste. Plus Beethoven est musicien, et plus il arrive qu'on oublie son art. Et quand on est le plus entré dans sa musique, on se surprend à l'abstraire lui-même de la musique. Plus une époque est voluptueuse, et moins Beethoven sera compris.

A quoi répond la puissance du sentiment, dans Beethoven, et la simplicité des idées qui la sus- citent ? Ce grand et doux sanglot, cette action irrésistible, cet assaut d'un héros contre le destin, le siège soutenu contre toutes les offenses de la fatalité, et le cœur au donjon de la place, cette valeur indomptable dans la lutte, et cette volonté de vaincre qui force toujours la victoire : toute la musique de Beethoven en est pleine : on les entend partout dans ces œuvres si mâles, que la grâce en est presque toujours absente, et qu'on ne l'y regrette pas, par une exception presque unique. Voilà bien le son de cette grande voix, si chère à tous ceux qui en partagent l'émotion pathétique.

�� �