Page:NRF 8.djvu/611

Cette page n’a pas encore été corrigée

MIGUEL MANARA 605

Je ne suis pas grand clerc ; je lis mal dans les livres; la bêche et le râteau sont mes compagnons ordi- naires ; et qu'un mot un tantet, un tantinet savant me vienne taquiner l'oreille, me

voilà muet comme l'ami ver de terre. Aujourd'hui, cependant, j'ai tout compris ; la

bonne parole du pénitent est tombée dans mon cœur comme poignée de

graine rare. Et savez-vous qu'il me fallut, au début du sermon, mordre la lèvre et fermer l'œil, pour ne pas rire ? Est-ce ainsi que l'on parle de Notre Seigneur,

pensai-je ; voilà un langage de muletier ou de vieille femme; et sommes-nous des enfants, pour qu'on nous dise

ces choses ? Et puis, tout-à-coup je sentis que cette voix venait

non point de bouche d'homme, mais comme des

lèvres d'une blessure profonde. Et lorsqu'il nous parla du Seigneur marchant sur

la mer son éloquence se fit douce à mon oreille comme

la voix des grandes eaux soudain calmées et pénétrées d'une lumière de

tendresse.

DEUXIÈME RELIGIEUX. — J'ai suivi comme vous, mon frère, en tous ses points

4

�� �