Page:NRF 8.djvu/606

Cette page n’a pas encore été corrigée

600 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Que les mains de Dieu mesurent l'amère ration du jour et de la nuit

et non les miennes ! Non, le beau ciel innocent ne dira pas :

voici Manara qui m'apporte une douleur barbouil- lée de couleur odorante

comme la peau de la prostituée qui pleure !

Non, mon père !

Vous aurez en moi un animal doux pour faire tourner votre moulin,

un bœuf qui se laissera huiler le cou et les flancs

de cette pitié qui cicatrise la morsure de l'aiguillon

et endort pour la nuit la brûlure pâle du chanvre.

Afin que l'aube nous trouve vaillants !

Et joyeux comme le cri pieux du coq !

Et pleins d'une vigueur affamée d'expiation !

L'ABBÉ. — Bonté du Ciel !

il babille déjà, mon Manara, comme un moine

qui mendie pour ses pauvres au milieu d'une foule

rieuse et bariolée, dans le beau midi de dimanche, quand sonne le

soleil chrétien et quand toute la ville sent la messe trop longue

et la victuaille de choix. Eh, tout beau, tout beau. Monsieur. Faites économie d'éloquence et de chaleur, je vous

prie, pour le jour d'automne et le soir d'hiver,

�� �