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MIGUEL MANARA 599

quand la chair est morte et quand le sang a blanchi et quand la moelle s'est desséchée,

et quand l'amour passé et quand la douleur passée,

quand l'amour et la douleur et la haine

sont devenus fantômes où l'épée se noie comme dans l'eau

et où la lèvre ne heurte plus que sa propre ger- çure, comme dans la vapeur du verre,

c'est alors que l'on parle à Dieu non plus de soi- même

et de son misérable malheur, mais de l'homme,

et de l'écume, et du sable,

et du vent et de la pluie ! Sais-tu quel saint a dit:

voici mon frère le vent, voici ma sœur la pluie ?

O mon enfant ! Si tu savais quelles choses l'homme sait dire à Dieu

quand la chair de l'homme se fait cri, cri de Dieu s'adorant soi-même !

— Tu n'as pas le visage d'un homme qui écoute, Miguel.

Tu penses trop à ta douleur.

Pourquoi cherches-tu la douleur ?

Pourquoi crains-tu de perdre celle qui t' a su trouver ?

Pénitence n'est pas douleur. Elle est Amour.

DON MIGUEL. — Je vous entends, mon père.

Loin de moi le pauvre désir de noyer mon infamie dans l'ivresse de ma douleur !

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