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220 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

bête. " Cette façon raisonnable et sèche d'entrer dans le monde de l'intelligence peut-elle être celle d'un adolescent à l'esprit ardent, confus et géné- reux ? Le Taine de 1861, quelle pensée son sens au moins technique de la vie lui suggéra-t-il, lorsqu'il vit l'Etienne Mayran qui sortait de ses mains ? Un petit vieux de seize ans ! Il n'y a pas là seulement l'échec de l'auteur, mais l'échec du genre, du roman sur " l'adolescent qui commence à penser ", roman qui ne peut aboutir qu'à l'un ou l'autre de ces deux attentats, vieillir l'adoles- cent ou puériliser la pensée.

Quoi qu'il en soit de ce sujet particulier, M, Bourget regrette la décision de Taine et croit qu'il aurait réussi dans le roman : " Qui pouvait mieux que lui, dit-il, traiter ce thème ; l'histoire de la sensibilité d'un grand intellectuel dans le Paris d'après 1850 ? " 11 se fût agi, cette fois, du roman de l'homme qui pense, et contre ce roman ne valent plus les objections de principe et de fait qui vont contre celui de l'adolescent au début de la pensée. Peut-être Bouvard et Pécuchet donne- t-il la caricature d'un grand et décisif roman dont la place était marquée à cette époque, et qui ne fut pas écrit, d'une Recherche de V Absolu qui eût brisé son cadre individuel et flamand pour devenir un grand tableau social et vivant. Mais Taine ici était-il qualifié } C'est possible. Qualifié pour nous donner une magnifique œuvre manquée, une œuvre

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