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NOTES 175

quoi ce qui leur reste est émouvant et que cela seul a qualité pour nous émouvoir.

��Dépouillons-les d'abord sans crainte du décor et des costumes. Ce n'est pas que ces accessoires ne soient souvent admirables, et même fort utiles : le décor pour servir de support et comme de réflecteur aux gestes, les costumes pour dégager la ligne du corps et lui rendre sa continuité. Mais j'ai vu répéter en costumes de ville, jadis, VOiseau de Feu, cette année, Daphnis et Chloé. Nulle expérience ne pouvait être plus décisive. Sur la scène, un homme en manches de chemise, son faux-col posé sur une chaise, danse : c'est assez. A chaque fois qu'il lance les jambes en arrière en élevant les bras de cette façon grotesque et sublime — il s'agit de la danse comique de Dorcon — à chaque fois qu'il fait ces quelques pas habilement empêtrés, à contre-temps sur la musique, je sens battre mon cœur, j'éprouve le dérangement et l'allégresse de l'admiration. Je tiens mon plaisir ! Il est vrai, puisqu'il peut être seul.

Cependant un de nos peintres les plus en vue disait en par- lant d'un ballet dont il avait peint le décor : " Avez-vous vu ma pièce ? "

��Mais voici qu'il nous faut opérer un retranchement plus hardi. Il ne s'agit plus seulement d'écarter du danseur certains ornements tout extérieurs et auxquels lui-même renonce parfois spontanément ; il s'agit de distinguer entre son repos et son mouvement et de n'accepter, entre les divers usages qu'il fait de son corps, que cette façon qu'il a de l'animer et de l'élancer en avant.

En effet le corps humain peut nous toucher par sa seule atti- tude et rien que par un certain tour donné à son immobilité.

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