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bonnement ; et plus paisible, sa voix traîne un peu sur les mots ; il a l’accent de Plainpalais, où l’on ne parle pas le chinois ni l’arabe, mais le français, comme à Metz, je vous prie, ou comme à Strasbourg, ceux qui le parlent : en tout cas, mieux qu’à Nîmes.

C’est Jean-Jacques, nom populaire qui dit tout.

§

Enfant, j’ai connu de très vieilles gens, en province, en Italie ; d’autres, qui avaient voyagé en Russie, en Suède, en Grèce, en Orient. Plus que Montaigne, plus même que Molière, pour tous, Rousseau et Voltaire étaient la France, étaient Paris : la pensée dans ce qu’elle a de plus hardi et de plus humain, le refuge contre toute barbarie, l’espoir et la patrie pour tous les esprits en exil de la vie libre. Qu’on en rie, au besoin ; mais on ne sait ce qu’on fait, si on le nie.

Grandes ou petites bibliothèques, n’eût-on que deux cents volumes, Voltaire et Rousseau en faisaient le fonds. Ces trois rayons de livres étaient vraiment, par tous pays, le soleil de l’esprit et la lumière française. On savait le français pour les lire. Les hommes mêmes se distinguaient par la préférence qu’ils donnaient à Rousseau sur Voltaire, ou à Voltaire sur Rousseau. On peut les haïr ensemble, aujourd’hui ; mais il faut être bien