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904 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

��VIRILITÉS, (Maximes et pensées de Napoléon Bonaparte) avec une introduction de Juki Bertaut. (Sansot.)

Puisque l'éloquence, que ce soit celle de la tribune, de la chaire ou des salons, intéresse de moins en moins les écrivains et joue un rôle de plus en plus effacé dans la vie publique, les mots historiques, les mots illustres, les mots à citer ont perdu le plus brillant de leur lustre et leur plus bel emploi. Comme ces aphorismes ne sont le plus souvent ni très profonds ni très justes, ils ne font leur eftet que dans le rapide mouvement d'un dis- cours. Ils paraissent creux à la lecture. Ajoutons que, séparées du contexte ou dépouillées du récit où elles devaient s'encadrer, ces "pensées" de Napoléon semblent souvent plates ou gratuites. Elles prennent en tout cas une apparence générale et abstraite qu'elles n'avaient sûrement pas à l'origine. Comme aucune date ni référence ne les accompagne, on ne peut distinguer une parole qui remonte aux guerres du Consulat d'une autre pro- noncée à Sainte-Hélène. Voilà qui importerait pourtant, car telle affirmation qui ne serait que bravade dans la bouche d'un jeune homme, prendrait chez l'homme mûr un poids singulier.

Pour vivre d'une vie absolue et détachée de toute circonstance, il faut à une maxime une rare plénitude. On ne supporte pas cette sorte de lecture plus d'une page ou deux. Les aphorismes de Napoléon ont sur ceux de tel écrivain l'avantage que même utopiques ou absurdes, ils conservent cet intérêt qui s'attache à tout ce qui vient d'une nature vraiment puissante et domina- trice. On en trouve d'ingénieux :

" Les affaires interminables sont celles où il n'y a pas de difficultés."

" Il n'y a que deux leviers pour réunir les hommes : la crainte ou l'intérêt. Toute grande révolution doit procéder par

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