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JULIETTE LA JOLIE 823

beau jour. Si, comme bien d'autres, il ne mettait pas les pieds à l'église, il était heureux de ce que sa femme fût assidue aux offices. Car la mère Boussard venait à peine de partir pour les Vêpres que la Bigre, comme on l'appe- lait, se hâtait de la remplacer. La Bigre n'était pas farouche; elle aimait boire, et son homme la laissait tranquille. Les Vêpres duraient trois quarts d'heure, mais le vieux ne perdait pas de temps. Parfois même, pour aller à la cave qui était située au fond d'une cour, il n'attendait pas que sa femme fût partie.

— Il fait chaud aujourd'hui, père Boussard ! lui dit Gallois. Vous allez boire un fameux coup.

— Pour sûr ! répondit le père Boussard qui ne s'arrêta point.

Assis sur son banc, devant sa maison, Nolot fumait sa pipe, en véritable propriétaire. C'était un homme de grande taille, au teint rouge brique, chauve à quarante- cinq ans. Qu'il fût parmi les ouvriers les plus à leur aise, on s'en apercevait bien à jeter un coup d'oeil, en passant, à l'intérieur de la maison : édredon recouvert de dentelle, fauteuil au pied du lit, sur la table ronde un bel hortensia dans un cache-pot doré. Quand il aperçut les Gallois il ne se dérangea point. Ils n'en étaient. Dieu merci ! plus à faire des manières. Une de ces amitiés les unissait comme il en existe dans les petites villes où les distractions sont rares : il est agréable de connaître quelqu'un chez qui l'on se sente comme chez soi tout en étant hors de sa propre maison. Parce que l'on ne peut pas se payer des parties fines dans des restaurants qui n'existent pas, une fois par mois au moins on dîne les uns chez les autres. Ils ne ressemblaient pas à ceux qui vivent comme des ours

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