Page:NRF 3.djvu/751

Cette page n’a pas encore été corrigée

PAUL GAUGUIN - 74 1

Il n'attend pas d'obtenir des objets, à force de les copier, un accord. Dans ses paysages, des lignes flexibles traversent les champs et de leur sinuosité horizontale enchaînent les arbres aux arbres. — Pourtant aucune violence n'est faite à la nature. La composition se contente de l'éveiller ; elle descend vers les choses, elle les touche en silence comme on avertit de la main quelqu'un d'endormi. Puis elle les laisse se lever librement. Elle ne fait que les assister de sa présence multiple, que solliciter leur développement par sa délicatesse invisible.

Le magicien évoque les beaux fantômes vivants.

�� ��Comment discerner à quel moment la couleur de Gauguin quitte la couleur des choses pour devenir artificielle ? Le passage est insensible. Par une transformation subtile elle cesse peu à peu d'être naturelle ; elle se fait silencieusement mer- veilleuse, elle s'ouvre à l'enchantement.

Elle est sourde et fleurie. Elle s'étend en flaques claires mais comme voilées par l'absence du soleil. Ce n'est pas la profondeur de l'objet qu'elle exprime, mais son visage plein de sourire dans la diaphanéité de l'ombre. Chaque nuance s'épanouit largement, avec quiétude ; elle déborde jusqu'à s'étaler, et sitôt se tient muette. Elle est

4

�� �