Page:NRF 3.djvu/476

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.



SOIR DE RENTRÉE


C’était, il m’en souvient, par une de ces après-midi d’Octobre, mélancoliques et ternes, toutes brouillées de nuages sales, enchevêtrés. Le vent du midi soufflait : vous savez, cette haleine chaude et humide, épaisse et molle qui fait tourner la crème.

Les allées sentaient l’eau des vases où des bouquets ont pourri. Les pieds s’engluaient au bord des prés bossues de nids de taupes, et l’on croyait toujours marcher sur des limaces. Il y avait une grande détresse dans l’air.

Là-bas, dans la plaine, les treilles des vignes semblaient de longs filets tendus, hors d’usage, tout déchiquetés par la morsure de poissons fantastiques. Au ras du parc, les peupliers érigeaient leurs lamentables baleines de parapluies retournés en tulipes et, autour de nous, les feuilles voletaient comme des oiseaux blessés. On en voyait encore cramponnées aux moignons des tilleuls mais, à chaque minute, on sentait leur force diminuer, leur étreinte se desserrer : un souffle plus fort les emportait dans le ciel, avant de les laisser retom-