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l'amateur de m. remy de gourmont 427

Chez ceux-ci je vois plus de naïveté, chez lui plus de résolution. N'importe ; il est de la même lignée.

On pourrait dire de lui ce que Carlyle dit de Voltaire : " Pour lui, en toutes choses, la première question est, non pas ce qui est-vrai, mais ce qui est faux; non pas ce qui est digne d'être aimé, et main- tenu fermement, et gravement pris à cœur, mais ce qui est à dédaigner, à tourner en dérision, et à jeter en plaisantant à la porte. " 1 Je retrouve également chez Gourmont cette fatale propension à taxer de sottise ou d'hypocrisie tout ce qui témoigne admi- ration, vénération ou piété ; dont mille exemples dans Voltaire ; je copie simplement, parceque je les crois peu connus, ces significatifs passages d'une lettre au père Bettinelli (mars 1761) :

" Je fais grand cas du courage avec lequel vous avez osé dire que le Dante était un fou et son ouvrage un monstre. " Et plus loin : " Je crois que, dans le fond, il (Algarotti) pense comme vous sur le Dante. Il est plaisant que, même sur ces bagatelles, un homme qui pense n'ose dire son sentiment qu'à l'oreille de son ami. " D'où la con- clusion : " Ce monde est une pauvre mascarade."

M. de Gourmont est décidément " un homme qui pense " ; et si, dernièrement, il a pris coutume d'exposer sa pensée sous forme de dialogue mi- confidentiel, mi-badin entre M. Delarue et M. Des-

1 Nouveaux Essais de critique — traduct. Edmond Barthélémy Mercure de France, p. 40.

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