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JOURNAL SANS DATES 295

laissé nos sacs. Nous voici sur la place du village. Nous circulons dans un livre de Philippe. On nous indique le chemin de sa maison. Elle est là sur la route qui monte, passé l'église, presque en face de celle du Père Perdrix. Au rez-de-chaussée les volets de l'unique fenêtre sont clos comme les paupières de quelqu'un qui se recueille ; mais la porte est entrebaillée. Oui c'est bien ici : quel- qu'un ouvre la porte en sortant et dans l'étroite pièce, en face de l'entrée nous voyons entre deux cierges allumés la bière revêtue de noir et couverte par les couronnes. La mère s'empresse vers nous, s'étonne de nous voir; aimait- on donc tant que cela son enfant ! elle nous présente à quelques gens du pays qui sont là : des amis venus de Paris tout exprès ; elle en est fîère. Une femme sanglote à l'écart ; c'est la sœur. Oh ! combien elle lui ressemble ; son visage m'explique celui de notre ami, que déformait un peu, au côté gauche de la mâchoire, une très apparente cicatrice que la barbe cachait mal. Le beau-frère, affable- ment vient à nous et nous demande si nous voulons, avant que vienne plus de monde, voir la chambre de Charles-Louis.

Cette maison est tout entière à son échelle ; c'est parce qu'elle était très petite qu'il en est sorti tout petit ; à côté de la chambre-salon où l'on entre d'abord, la pièce claire et vide où le sabotier, son père, travaillait ; elle prend jour sur une courette, où donne également la chambre de Philippe au premier. Chambre étroite et point ornée ; à droite de la fenêtre, une petite table où écrire ; au-dessus de la table des planchettes avec quelques livres et la haute pile de tous ses cahiers d'écolier. La vue qu'on aurait de la fenêtre est coupée court par deux ou

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