Page:NRF 3.djvu/177

Cette page n’a pas encore été corrigée

169

��L'ENFANCE ET LA JEUNESSE DE CHARLES-LOUIS PHILIPPE

��Charles-Louis Philippe a connu très jeune la loi des pauvres, qui est de souffrir. De son enfance il parlait peu, sinon dans ses livres, où maintes fois il s'est peint trop fidèlement, c'est-à-dire aussi pauvre qu'il eût souhaité de l'être. La vérité est qu'il n'a pas connu l'extrême misère, celle qui abaisse l'homme et l'avilit ; il n'a pas, comme le petit Charles Blanchard, passé les soirées d'hiver à trembler devant l'âtre éteint et à crier de froid, de faim, de peur et de solitude. Fils d'un sabotier de village, il a grandi comme les fils du maréchal et du charron, ses voi- sins et ses égaux ; il eût pu vivre comme eux de quelque métier simple, " que l'on fait dans une petite maison, auprès de sa fenêtre qui donne sur un jardin ". Mais comme il était plus petit, plus silencieux, plus recueilli que les enfants de son âge, comme il portait déjà sur lui cette marque invisible qui fait le vide autour des êtres supérieurs, il a très vite appris à vivre loin des autres et à souffrir plus qu'eux. Le dimanche, à la sortie de la messe, en s'effàçant dans les jupes de sa mère pour laisser passer les enfants des riches, il a connu qu'il y avait à Cérilly deux sortes d'enfants. Il avait sept ans lorsqu'un mal atroce, la carie des os, s'installa dans sa mâchoire: l'Ennemi ron- gea pendant plus d'un an sa jeune chair mal défendue, et

�� �