Page:NRF 19.djvu/89

Cette page n’a pas encore été corrigée

NOTES 87

ouvrage, il faut se réjouir qu'il tire son plus grand mérite de l'intelligence de franc ajoi qui y pétille d'un bout à l'autre.

BENJAMIN CRÉMIEUX

LA POÉSIE

LA SYMPHONIE HÉROÏQUE, poèmes, par Henry Jacques. (Aux éditions de Belles-Lettres. Prix de la Renais- sance).

Ce sont des poèmes sur la guerre, ou contre la guerre, qu'anime une générosité un peu vague et grandiloquente mais pleine de conviction. La valeur en est très inégale. Une certaine faconde oratoire y tient souvent lieu de souffle épique et le goût de l'amplification y paraît avec tous les mouvements et coupes conventionnels que dissimule une récitation complaisante.

Il serait fort malséant de dénier à M. Henry Jacques, qui a fait la guerre, le droit de la détester, mais l'invective n'est pas de style héroïque, c'est un fait et le leit-motif « guerre à la guerre » n'est pas moins propice que « guerre du droit » ou « guerre fraîche et joyeuse » au verbalisme déclamatoire. Il faut se résigner à rimer des clichés de gauche ou de droite, à moins de se résoudre à écrire, non l'épopée de la guerre, mais les poèmes d'un homme dans la guerre, des poèmes de circonstance. Le mode épique exige la sympathie ou le respect du poète pour le sujet. Les Châtiments, en dépit du génie de Hugo, ne se lisent pas sans gêne.

Et voilà les soldats, les simples au cœur nu

Dans le nimbe de cuir des vieilles jugulaires

Ils s'en vont, sans savoir qu'ils sont toute la guerre

Vers quelque grand destin qui leur reste inconnu.

Sur cette route étroite où le droit les endigue Ainsi vont-ils offrant aux triomphes Jutur s, Taciturnes sauveurs aux dévouements obscurs Leur adorable sang et leur sainte fatigue

Dans le piétinement de leurs brodequins lourds, Moi que cette cohue a roulé dans ses charges J'écoute retentir, encor lointains et sourds, Les pas mystérieux de l'avenir en marche.

�� �