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674 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

— Eh bien ! je le regrette pour vous. Vous valez mieux que cela.

— Je vous répète qu'il n'y a rien à faire ici, dit encore Bonnin, à la fois piqué et flatté de ce qu' Autissier venait de dire.

— Rien à faire, ce n'est pas prouvé, dit Autissier, avec l'excitation et la légère émotion de voir que ses propres préoccupations et celles de ces garçons qui se trouvaient être ses camarades pouvaient se traduire dans le même langage assez vulgaire et viril : il y a ou il n'y a pas à faire dans ce pays.

Un instant il eut sur les deux autres l'autorité que peut avoir en ces matières un joli garçon, qui devait s'y con- naître et qui pouvait remporter une victoire là où les autres avaient échoué.

— Si l'on s'y mettait sérieusement, dit Voyle, si au lieu de nous enfermer au café et de renoncer de gaîté de cœur à toutes nos soirées, nous essayions de frayer avec les gens du pays, de faire des connaissances.

— Mais c'est toi-même avant l'arrivée d'Autissier qui ne voulais pas sortir, tu ne te plaisais qu'au café, tu ne me lâchais pas d'un cran pour me faire jouer à la manille.

— Ne t'inquiète pas de ce que je faisais l'autre année. Laisse-moi dire... Si nous faisions ce que je dis sérieuse- ment, avant un mois, nous trois, nous aurions de quoi nous moquer de Jonquières, et nous ne serions pas exposés à aller dans sa cave le voir lutiner la petite institutrice pendant que nous sommes là à tirer la langue comme des veaux.

— Eh bien nous verrons dans un mois, dit Bonnin sceptique.

— Naturellement, dit Voyle, nous n'aurons rien fait. Parce que nous v penserons deux jours et que le troisième nous irons boire des bocks. Mais il faudrait arranger quel- que chose. Il faudrait se fixer un délai.

— Oui, pourquoi pas, dit Autissier, intéressé. Il faudrait qu'il y eût à nous trois une espèce d'entente.

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