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« Les sources égouttées dans le silence de l’aurore et le réveil de la rainette égaient le pèlerin, mais plus encore au foyer de l’auberge assis, d’entendre dans la nuit craquer la neige sur les cèdres et la lointaine voix au loin de ces oiseaux mystérieux qu’enfante le courroux de la mer. »

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« — Oui, dit Médée, j’ai le cœur dur ; mais c’est aux pierres que dort le feu. »

La voix baisse chez Toulet dans l’instant que chargée, — jamais plus émouvante que lorsque sonne le couvre-feux. De quel prix n’est pas un cœur dur bien placé ? Et ceux-là, ce n’est guère qu’en France qu’on les trouve sans défaut.

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« Ils deviennent des almanachs de l’autre année. » La Bruyère le disait : « des livres faits par des gens de parti et de cabale ». Les Trois Impostures portent en sous-titre : almanach ; qu’elles sont exemptes de ce péril ! « L’avenir qui n’est pas un juge nécessairement lucide et équitable », écrivait un jour Valéry ; en tout cas un avenir qui ne retiendrait pas l’œuvre de Toulet serait un avenir bien peu français : certaines des plus indéfinissables qualités françaises — natives, jamais proclamées — s’y distillent et tout ensemble s’y rétractent. Mais n’anticipons pas ; ce serait contrevenir à l’adage des Trois Impostures : « C’est le temps qui donne aux chefs-d’œuvre, comme aux grands vins, la lumière, la saveur, la gloire. »

CHARLES DU BOS

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ESSAI SUR LE DONJUANISME CONTEMPORAIN, par Maurice Barrière (Monde Nouveau).

Une nouvelle édition des Mémoires de Casanova, appelée à quelque retentissement, va de nouveau inquiéter l’opinion par l’énigmatique figure de Don Juan. Le séducteur n’a pas eu bonne presse ces temps derniers, devant le public de courriéristes et de bonnetiers pour lequel les sieurs Rostand et Bataille commettaient d’emphatiques niaiseries et soumettaient la grammaire à des supplices chinois. Dans le même temps, on a