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CHRONIQUE DRAMATIQUE 46 I

sous u ur utile à leurs intérêts. Nous sommes donc bien renséij ^. Ce que j'en dis là n'estpas par passion. Je me moque bien trop, je l'ai dit, de toutes ces questions. C'est seulement la jobard . Je certaines gens, les dupes qu'ils sont si docilement qui m 'isent. Nous avions déjà les gens qui continuent la guerre avec leur porte-plume. Nous avons maintenant ces cour- tiers de publicité politique. Plus rien ne nous manque.

Je reviens à la révolution russe. Elle ne me tourmente donc pas. De plus, je me méfie fort de tout ce qu'on peut raconter à son sujet. Je n'ai d'opinion que sur ce que je connais. Elle me serait même complètement indifférente sans les souffrances qu'elle cause. Sur ce point, je ne puis me dire : Qu'importe ! Est-ce bête ? Ferais-je pas mieux de m'en ficher ? Je n'y puis- rien ! Pourquoi me tourmenter ? Mais non ! Il n'y a pas moyen. 11 m'a d'y penser et c'est pour moi un malaise de me

représenter tant de gens souffrant de la faim et des pires priva- tions. Qui me rendra l'indifférence que j'avais dans ma jeu- nesse ! !■ suis devenu, avec les années, sensible à l'extrême. On se fait de moi une idée fausse, peut-être, parce que je parle souvent des bêtes, parce que je suis plein de pitié pour les souf- frances de ces êtres muets, sans défense, dans notre entière dépendance. Il n'y a pas que les bêtes. La cruauté, la violence, en quelque domaine qu'elles se produisent, quels que soient les êtres qu'elles atteignent, me plongent dans le dégoût, le découragement. J'ai honte dans ma raison, mal dans mon être physiq v Je me sauverais, si je m'écoutais, pour ne plus rien voir ni entendre. Il y a quelques semaines, je suis resté pen- dant trois soirs sans pouvoir penser à autre chose pour avoir lu le livre de Madame Odette Keuhn sur certaines choses de la Russie actuelle. Je me suis bien juré de ne plus rien lire de cette sorte. J'étais furieux contre moi. Je me traitais de femme. Le fait est que j'aurais fait un mauvais général. Au moment de la bâtai:!'-, j'aurais rassemblé mes troupes et celles d'en face. « Il est bien bête de nous casser la figure, leur aurais-je dit. Si vous voulez, nous allons jouer la victoire à pile ou face. Cela vaut la valeur militaire, nous nous serons évité un vilain spectacle et les lois de la guerre seront satisfaites, puisqu'il faut un vain- queur et un vaincu. » Notez que je ne vois jamais si sensibles les gens qui s'intéressent si fort à la révolution russe. Ils sou-

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