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SILBERMANN 297

��VI

��Dès que cela me fut possible, j'allai vers Silbermann et lui posai des questions. Il me répondit avec un mouve- ment d'insouciance mais cependant sur un ton précipité qui trahissait son trouble :

— Il arrive à mon père ce qui arrive très fréquemment dans son métier. Il a vendu comme authentiquement anciens des objets qui ne le sont pas ou qui avaient été restaurés. Il les reprendra, indemnisera l'acheteur, et l'affaire n'aura pas de suite.

Il se trompait. Le lendemain, de nouveaux détails appri- rent que la vente s'était faite à l'aide de faux papiers et que l'acheteur lésé maintenait sa plainte. Ces explications étaient produites par le journal qui avait le premier ébruité l'affaire, La Tradition française, et qui appartenait à la ligue des Français de France. On ajoutait que d'autres faits plus graves encore pourraient être reprochés à l'antiquaire Silbermann.

Deux jours passèrent. L'anxiété de Silbermann grandis- sait visiblement. Etant avec moi, il tomba à plusieurs reprises dans de lourds silences d'où il sortait par une animation factice s'il se voyait observé, comme font ceux qui veulent détourner de leur personne un soupçon.

Ce soin était nécessaire, car l'affaire Silbermann était devenue au lycée le sujet de toutes les conversations. Dans la cour, on chuchotait sur son passage, on le montrait du doigt ; et me rappelant ce qu'il m'avait confié sur sa sensi- bilité, sur son œil toujours en éveil, je pouvais imaginer quelles étaient ses souffrances.

Un matin, La Tradition française annonça qu'une nou- velle plainte était déposée. Il s'agissait cette fois d'achat et de recel d'objets volés. J'étais assez au courant des choses juridiques pour savoir les conséquences possibles de ces

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