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accru de toutes les richesses que l'imagination y ajoute et que le jugement en extrait, si l'on accepte complètement la fable que l'auteur présente dans son prologue, l'œuvre, sous ce nouveau point de vue, se montre de proportions parfaites, et construite selon les meilleures règles, non plus du genre, mais de l'analyse intérieure.

Robert d'Egmont, qui eut, dans son beau temps, une grande réputation dans les milieux monarchistes de sa province, meurt, vers la cinquantaine, d'une façon mystérieuse, assassiné au coin d'un bois. Bien des années après, M"^ de Querrevégant, sa fille, ayant pris connaissance d'un carnet de notes griffonnées par son père, et qui éclairent singulièrement l'obscurité de ce trépas, l'apporte au romancier : « Vous allez écrire une fable. Elle ne sauvera aucun innocent, elle ne punira aucun coupable. Cependant, quand des faits iniques sont mis au net par un cerveau clairvoyant et juste, il me semble que la bonne cause y gagne. »

Boylesve a donc (admettons-le) connu Egmont dans sa jeu- nesse. On sent bien que c'est là son principal attrait, et qui lui mérite un portrait détaillé. Il aurait pu oifrir dix autres appa- rences, conformes à son destin, ou même n'être crayonné que dans une esquisse indécise, sa place dans le drame n'eût pas été modifiée, ni son sort malheureux : il a beau être la victime, il n'est en somme qu'un comparse, porté au premier plan, non point précisément en vertu de son caractère, mais par le hasard malencontreux d'une rencontre tardive et d'une dérobade der- nière devant une vieille chercheuse d'amour, en quête d'un émoi vainement poursuivi et qui croit reconnaître le seul homme capable d'en satisfaire l'appétit dans celui qui précisément s'est toujours refusé à tenter l'expérience. Mais, bien plus que comme ■victime, c'est comme témoin et comme évocateur des jours anciens qu'il intéresse l'auteur. Sur la toile du souvenir, tout à coup déroulée, il a sa place marquée, entre Laure, la grand'- mère et xM"^ Cloque. La meurtrière, M™^ de Blou, y apparaît aussi, puisque cette femme, alors jeune, s'offrit, au cours de ses recherches, au potache Boylesve. Mais elle n'est pas mêlée aux autres personnages, elle n'a pas la même couleur, et, si elle surgit au milieu d'eux, c'est qu'une circonstance particulière la met en vedette et l'extrait de la foule oii elle était perdue.

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