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50é LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

pour les autres âges. L’œuvre se lie à la vie, elle en consen,e toujours l’empreinte, elle en fixe les moments, et en reflète l’unité. C’est Gœthe lui-même qui a eu soin de nous révéler les liens intimes qui unissent les deux. Pour lui ni la science ni la poésie ne sauraient se suffire à elles-mêmes ; elles ne sont rien en dehors de la vie. Et la vie, c’est tout l’ensemble des actions et des réactions à travers lesquelles se manifeste une person- nalité ; rien n’y est indifférent, tout s’y situe et sert à composer l’ensemble. La vie chez Goethe, pourrait-on dire, embrasse et pénètre tout, elle semble à tous moments ra5’onner au dehors et absorber en elle tout ce qui se présente. C’est la vie continue et qui pour se retrouver n’a pas besoin de ces moments d’extase où l’âme se replie sur elle-même. Vie qui ne semble pas devoir connaître de fin : arrivée à son terme naturel, elle rebondit encore et la vieillesse n’a pu ralentir son essor.

C’est aussi pourquoi écrire la vie de Goethe, signifie en quel- que sorte faire la biographie par excellence, et cela explique que l’intérêt qui s’attache à sa vie peut même dépasser en un certain sens celui qui s’attache à ses œuvres. En effet si vraiment il est possible de concevoir l’art du biographe comme l’interprétation d’une vie, qui situerait tout événement, toute rencontre, toute impression de manière à en faire comprendre la suite etl’unité, il semble que l’on ne puisse trouver de meilleur objet que la vie de Goethe.

Aussi est-ce avec grand intérêt que je me mis à lire le livre de M. Gundolf dont je voudrais vous parler aujourd’hui (F. Gun- dolf. Goethe. Ed. Georg Bondi, Berlin). M. Gundolf, je m’em- presse de le dire, a parfaitement compris ce qu’il devait à son art et à Goethe. C’est ce qui nous permettra d’aborder aussitôt les grands problèmes qui se posent au sujet d’une biographie de Goethe.

Dans son introduction, M. Gundolf a soin de nous dire quelle fut la méthode qu’il a suivie en son ouvrage. Il com- mence par se demander quelle est l’importance relative qu’il faut attacher aux différents témoignages que nous a laissés Goethe, et il en arrive au classement suivant : entretiens, lettres, œuvres. M, Gundolf nous dira que pour comprendre la vie de Goethe, c’est Goethe poète qu’il faut interroger avant tout, et non le Goethe que nous connaissons par ses lettres et ses entre-

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